Rapport sur le genre dans l’audiovisuel en Europe : les femmes toujours sous-représentées

24 octobre 2022 par - Vue(s) d'Europe

Dans l’industrie audiovisuelle européenne, la tendance semble structurelle, car comme toujours, les femmes manquent à l’appel.

En témoigne la dernière étude de l’Observatoire Européen de l’Audiovisuel (OEA) qui s’intéresse à la place des femmes dans l’industrie audiovisuelle entre 2017 et 2021. À travers l’analyse de six métiers, les réalisatrices, scénaristes, productrices, cheffes-opérateurs, compositrices et actrices, l’Observatoire montre que les femmes sont toujours peu représentées parmi les professionnels qui occupent des rôles clés derrière la caméra.

 

Peu de réalisatrices dans la fiction

Sur la période citée, les femmes représentent seulement 25 % de l’ensemble des réalisateurs de longs-métrages européens. Pire encore, l’analyse selon le genre de films, montre que les réalisatrices sont surtout aux commandes des projets les plus fragiles. Si elles représentent 30 % des réalisateurs de documentaires, les femmes ne comptent que pour 21 % des réalisateurs de fiction en prise de vue réelle et seulement 19% des réalisateurs de films d’animation. La même tendance s’observe en France selon une étude publiée récemment par le CNC. En 2011-2012, les femmes réalisaient 26% des films de fiction, dix ans plus tard, l’immobilisme s’est saisi de la fiction, puisqu’elles réalisent seulement 28% des films (+2%). Dans cette même étude, le CNC montre que l’animation française compte peu de réalisatrices avec un moindre coût des heures réalisées : entre 2016 et 2020, on compte 3 heures d’animation réalisées par les femmes en moyenne, contre 9 heures pour les hommes.

Ainsi, la proportion de femmes progresse de façon inégale chez les réalisatrices en Europe comme en France.

 

Des femmes qui prennent la plume, mais rarement seules

La part des femmes est plus élevée chez les producteurs (34 %) et les scénaristes (28 %) mais l’étude montre que peu de films de cinéma sont effectivement écrits par une majorité de femmes. Derrière un scénario, se cache souvent une œuvre de collaboration créée avec le concours de plusieurs personnes. En ce sens, les chiffres doivent être nuancés. Parmi les 39% de longs-métrages européens écrits par des scénaristes femmes, seules 13% d’entre elles ont écrit seules le scénario. En somme, seuls 19% des films européens sont écrits par une majorité de scénaristes féminins. C’est à se demander, si parmi les coauteurs majoritairement masculins, les femmes ont réellement le dernier mot.

Enfin, l’écart est encore plus frappant chez les directeurs de la photographie et les compositeurs, où les femmes ne comptent que pour 10 % des effectifs.

Par conséquent, les longs-métrages réalisés par des équipes de tournage majoritairement féminines représentent une minorité.

Il est cependant intéressant de noter que devant la caméra, l’écart entre femme et homme semble plus équilibré. Les actrices représentent en effet 39 % de l’ensemble des professionnels du cinéma et incarnent au moins un rôle principal dans un long-métrage.

 

Placer les femmes au cœur de la création

Multiplier les études en Europe permet de pointer les réalités : une part de femmes qui augmente n’est pas forcément signe de parité. Compter plus de femmes derrière la caméra ne suffit pas, encore plus quand cette part reste très minoritaire. Elles doivent prendre toute leur part dans le processus de création et être à la tête de projets qui s’inscrivent dans le cinéma de demain.

Dès 2012, la SACD publiait la première édition de sa brochure « Où-sont les femmes ? » consacrée à la place des femmes dans les milieux culturels. L’initiative, désormais intégrée dans l’Observatoire annuel de l’égalité entre les hommes et les femmes dans la culture et la communication, formulait des recommandations qui restent toujours d’actualité en France comme en Europe : fixer des objectifs chiffrés dans la politique de réduction des inégalités ; inscrire des engagements concrets et mesurables, en faveur de la présence des femmes et des œuvres créées, dans les cahiers des charges des établissements et des services publics audiovisuels ; promouvoir l’égalité femmes-hommes dans l’accès aux moyens de production…

La Commission européenne devrait sans tarder se saisir de cette étude et s’inspirer de ces mesures pour inciter les Etats membres à s’engager réellement en faveur de la parité dans l’ensemble des métiers et des genres de l’industrie audiovisuelles.

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