La culture prisonnière des accords de libre-échange

21 janvier 2009 par - Vue(s) d'Europe

La Direction générale du Commerce de la Commission européenne, désormais dirigée par Catherine Ashton depuis le retour de Peter Mandelson au gouvernement britannique, a lancé en 2007-2008 une longue série de négociations commerciales bilatérales pour contrebalancer l’absence de progrès du côté des négociations multilatérales de l’OMC.

Prenant modèle sur l’Accord de Partenariat Economique (APE), signé avec un groupe de 15 Etats des Caraïbes (Cariforum) en décembre 2007, la DG Commerce souhaite généraliser dans ses futurs accords de libre échange (ALE) l’insertion d’un protocole de coopération culturelle visant à faciliter et promouvoir la coopération culturelle et audiovisuelle entre les Parties.

Partant d’une bonne intention soutenue par la DG Culture de la Commission européenne dans le but de mettre en œuvre de manière concrète la convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles avec des pays en développement, ce protocole et son contenu culturel se retrouvent malheureusement désormais prisonniers d’un processus de négociations commerciales où l’accès au marché des services financiers se troque contre les droits de douane sur l’automobile.

La négociation de l’ALE avec la Corée est exemplaire à ce titre : la DG Commerce souhaite conclure au plus vite un accord et se contente de proposer aux coréens le modèle de protocole caribéen, sans se soucier du fait que l’industrie audiovisuelle coréenne ne soit pas celle d’un pays en développement et fasse jeu égal avec de nombreux Etats membres de l’Union. Le contenu du protocole et l’effet des mesures envisagées n’intéressent pas la Commission. Aucune étude d’impact n’a été envisagée, malgré l’appel répété des professionnels. Seul compte la signature d’un accord.

La culture et l’audiovisuel se retrouvent ainsi prisonniers de ces négociations commerciales, dont le calendrier et le rythme sont imposés par les négociateurs commerciaux. Pire, la culture et l’audiovisuel deviennent des monnaies d’échange dans le cadre d’une négociation globale, alors que c’est exactement ce que les Etats membres et la Commission ont toujours refusé dans les négociations OMC.

Il est urgent que les professionnels et les Etats membres de l’Union prennent conscience des effets pervers et rétrogrades de ce processus en marche. La culture, dont le statut particulier est désormais reconnu par la convention UNESCO, ne doit pas revenir dans le giron des accords de commerce. Il est indispensable que les discussions sur les protocoles de coopération culturelle soient déconnectées des négociations commerciales et ne soient proposés qu’à des pays ayant ratifié la convention UNESCO.

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