Chassez le naturel, il revient au galop !

12 décembre 2012 par - Vue(s) d'Europe

Le verre d’eau est-il à moitié plein ou à moitié vide ? C’est la question que l’on est en droit de se poser à l’issue du débat d’orientation sur le droit d’auteur qui s’est tenu entre les commissaires européens le 5 décembre dernier à Bruxelles.
Certes, dans le plan d’action défini par la Commission pour 2013-2014, ne figure plus une réforme en profondeur de la directive de 2001 sur le droit d’auteur dans la société de l’information ni l’ajout de nouvelles exceptions. Certes, la Commission semble désormais ouverte au dialogue avec les professionnels pour envisager un avenir durable pour le droit d’auteur qui est la garantie d’une juste rémunération pour les créateurs.

A l’évidence, la mobilisation réussie des 18.000 créateurs européens qui ont signé la pétition lancée par la Société des Auteurs de l’Audiovisuel (SAA) a eu une forte influence dans cette nouvelle démarche, moins va -t’en guerre, de la Commission sur le droit d’auteur.

Toutefois, elle n’a pas été suffisante pour échauder Neelie Kroes, Vice-Présidente de la Commission, en charge de notamment du Numérique, qui s’est fendue, 2 jours après cette réunion des commissaires, d’un blog très agressif à l’encontre du droit d’auteur.

Celui-ci est encore accusé de tous les maux : un anachronisme à l’heure de Facebook et Youtube (oubliant au passage qu’il y a aussi des acteurs européens comme DailyMotion) ; un facteur bloquant pour l’accès aux œuvres ; un facteur de frustration pour ceux qui regrettent la fragmentation du marché. C’est parfois même à se demander si le droit d’auteur ne serait pas non plus un peu responsable de la crise des finances publiques en Europe !

Soyons sérieux, c’est en Europe que le droit d’auteur a été créé il y a plus de 200 ans, et qu’il s’y est épanoui grâce à son adaptation permanente aux nouvelles technologies. Rien ne justifie de penser que le droit d’auteur est une anomalie à l’ère du numérique. Rappelons à Mme Kroes qui feint de l’ignorer que la SACD, par exemple, a signé des accords permettant la rémunération des auteurs sur les plateformes DailyMotion et You Tube. Rappelons-lui également que la fragmentation des marchés européens audiovisuels et cinématographiques  tient beaucoup à la diversité linguistique qui y existent et à des mécanismes de financement qui répondent à des logiques d’exclusivité et des marchés dont la cohérence est encore nationale. Rappelons-lui enfin que la SACD milite depuis des années pour une obligation d’exploitation permanente et suivie des œuvres qui obligerait les détenteurs de droits à exploiter les œuvres sur des plateformes légales, à l’issue des périodes d’exclusivité.

Céder au modernisme et au consumérisme en s’attaquant en permanence au droit d’auteur peut sans doute permettre de se sentir moderne mais cela n’en fait sûrement pas une ambition crédible pour une Europe en quête de sens, de repère et d’identité.

Bref, cette nouvelle sortie publique de Neelie Kroes a le mérite de montrer à tous les défenseurs de la culture que les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent et que la mobilisation reste encore le moyen le plus sûr d’éviter des initiatives négatives pour la création et le droit d’auteur.

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